Certains textes de l'Évangile ont des allures d'apocalypse, au sens commun du terme, la catastrophe finale dont on ne se remettra pas. C'est le cas de celui d'aujourd'hui. « En ce temps-là après une terrible détresse, le soleil s'obscurcira et la lune perdra son éclat. Les étoiles tomberont du ciel (etc. etc.…) ».
Pour bien des gens c'est d'actualité : « sauvons la planète, tout fout le camp ! ».
Et après le texte continue d'une manière un peu surprenante. Il est question du printemps que l'on voit parce que le figuier sort ses feuilles. Alors on comprend que l'été arrive bientôt. Chouette alors !
Ce qu'il faut piger : quand vous verrez arriver la catastrophe : « Sachez que le fils de l'homme est proche, à votre porte ».
Et on termine en nous disant qu'il faut pas se leurrer non plus : personne ne sait quand le ciel et la terre passeront… mais « mes paroles ne passeront pas… ». C'est Jésus qui parle.
Si je regarde ce texte avec des yeux extérieurs probablement qu'il ne m'intéresse pas parce que ce sont des sornettes bien connues des scénarios catastrophes que l'homme a toujours construits, de tout temps, et qu'il adore construire en ce moment dans les médias pour nous annoncer qu'on va tous y passer un beau matin sans s'en rendre compte. Sauf bien sûr si la COP 27,28, 29,30, 31 etc. arrive à prendre des décisions pour faire stopper tout ça avant la fin du siècle. Le fils de l'homme ne sait pas quand ça va arriver, mais l'homme ordinaire, lui, sait parfaitement tout, d'ailleurs il l'a lu sur les réseaux sociaux. C'est dire si c'est la Vérité Vraie.
Si je regarde avec des yeux intérieurs je fais le constat de mon expérience. Dans les tempêtes de ma vie quand tout était obscurci, à chaque fois j'ai ressenti que le fils de l'homme était proche, à ma porte. La porte intérieure celle qu'il faut savoir laisser ouverte sans crainte des courants d'air, du froid ou de troubles de l'intimité.
Il n'était pas une présence statique qui ne fait rien, observant le déroulement de la catastrophe avec passivité. Il ne faisait pas grand-chose non plus, en apparence. Juste un souffle, une haleine divine réchauffante, pas bien perceptible ; juste une Présence On en ressent l'action si on s'y fait attentif, non pas en permanence, mais au moins de temps à autre. Pas une consolation, mais le constat d'une action transformante invisible et lente, mais pleinement identifiable. Sauf quand je criais de détresse pour tenter d'étouffer le silence. On n'étouffe pas le silence, il y a sans cesse une présence qui le comble pour qui se laisse la ressentir.
Seulement voilà il y a tant de moments où on est rebelle, où je suis rebelle.
J'aimerais être plus souvent conscient de ce divin proche, à ma porte, et qui jamais n'abandonne la partie, simplement parce que c'est impossible pour lui. Ontologiquement. Il est l'inverse de l'abandon dans tous les sens du mot. Jamais il ne renonce.
Mais qui y croit… encore ?
----------------
Texte de l'Évangile (Mc 13,24-32): «En ces temps-là, après une terrible détresse, le soleil s'obscurcira et la lune perdra son éclat. Les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l'homme venir sur les nuées avec grande puissance et grande gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, de l'extrémité de la terre à l'extrémité du ciel.
»Que la comparaison du figuier vous instruise: Dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l'été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l'homme est proche, à votre porte. Amen, je vous le dis: cette génération ne passera pas avant que tout cela n'arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant au jour et à l'heure, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père».
Que c'est beau ce que tu écris!
RépondreSupprimermerci de tout coeur.
J'essaie de formuler ce que je vis.
SupprimerJ'ai mis du temps à me libérer des « discours convenus » tant pour parler de l'Évangile que de Jésus.
Merci beaucoup de ta visite ça me touche à chaque fois.
Mais qu'est-ce que tu es croyant ! Cela fait du bien de reconnaître la même manière de vivre dans la foi que la sienne! Merci, Alain !
RépondreSupprimerJ'ajouterais que "quand (tu) criais de détresse" ce n'était peut-être pas "pour tenter d'étouffer le silence", mais ton cri était celui-là même du Fils vers son Père "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné !" La "nuit obscure" de la foi... là où plus rien ne tient, où "le soleil s'obscurcit et la lune perd son éclat"... et c'est d'être passé tant de fois par ce lieu qu'on découvre mystérieusement que Dieu "tient parole : la catastrophe qui s'abat sur nous est la promesse d'une vie nouvelle qui surgit de la mort. Mon cri (celui du Christ, le mien, le tien... je ne sais) a touché le cœur de Dieu !
Tes commentaires m'apportent toujours un éclairage différent et complémentaire qui a du prix à mes yeux. C'est parce que toi-même ne cesses d'approfondir ta propre croyance et foi je le vois bien quand je te lis par ailleurs.
SupprimerJ'ai toujours été impressionné (je dirais positivement) par ce cri de Jésus que tu cites. Comme s'il était là parfaitement homme. En revanche «la nuit obscure » dont parlent les grands mystiques que j'ai lu… me restait obscure… ! (et sans vouloir faire de mauvais jeu de mots). Peu à peu on comprend qu'il ne faut pas vouloir y échapper. De toute façon la nuit obscure et là, qu'on le veuille ou non.
Chacun sait que c'est dans l'épreuve que l'on compte ses fidèles amis ou parents. Mais ils seront toujours avec une extériorité. Ils sont avec nous, mais pas en nous. La différence est de première importance.
La vie nouvelle qui surgit de la mort c'est « moi-et-Autre » indivisibles. Pas demain, plus tard ou jamais, mais maintenant. Et « se faire et se fier à ce réel » c'est quand même pas si facile que ça… pour moi en tout cas…
Ta dernière phrase me touche fortement et au bon endroit.
Oui, je le sais, je le ressens "à ma porte"... toujours là à m'attendre. Moi je fluctue, pas tout à fait abandonnée encore. Pas tout à fait consciente de qui je suis et de qui je ne suis pas mais qu'on m'a dit que j'étais et que j'ai cru que j'étais. Tout cela part en vrille maintenant comme l'apocalypse le décrit si bien. Je ne sais pas au juste par quoi je suis retenue. Les vieux sillons profondément encavés qq part en moi auxquels je crois encore je suppose... mais si peu. Je vais m'abandonner à l'eau de la rivière bouillonnante pour laver tout ça. kéa
RépondreSupprimerCelui qui me dira : il n'y a pas de problème, j'ai aucune difficulté à m'abandonner en confiance immédiatement et sans retenue… celui-là je ne suis pas sûr que je vais le croire. À tort peut-être. Mais non, je ne crois que c'est sans cesse à reprendre. Alors, certes, il existe des moments de total abandon confiant, mais les fluctuations que tu évoques je les connais très bien.
SupprimerAlors on fait comme on peut, tellement imparfaits que nous sommes.
J'aime bien ta dernière phrase. Je me permets d'ajouter ma touche personnelle : c'est l'eau qui nous lave, pas nous-mêmes. On est autonome (s'abandonner à la rivière) on n'est pas autosuffisant (la rivière lave).
Ton évocation de l'eau m'a fait revenir des souvenirs quand j'avais 13 ans, le corps encore très inerte par la paralysie. Au centre de rééducation, la rééducation en piscine, qui permet une forme d'apesanteur et qui est donc bénéfique. Face à ça mon immense trouille de me noyer, ma panique lorsque la kiné « me lâchait la tête ». Il en a fallu du temps pour comprendre qu'en m'abandonnant je flottais. Je réalise que c'est incrusté dans ma chair à présent. Il faudra sans doute que j'écrive un texte plus approfondi sur cet épisode qui n'était pas « que » de la rééducation fonctionnelle.
"en m'abandonnant je flottais". Ah oui, toi tu l’as vraiment vécu l’expérience de la rivière bouillonnante dont je parle. Si jeune en plus ! Sans doute que cette expérience t’a permis de voir le Vrai en pleine face parce que lorsqu’on s'approche d'un grand danger comme celui que tu décris, le superflu disparait et ne reste que le Vrai. Ça change une vie pour de bon. Alors oui, ce serait vraiment intéressant pour moi de lire ce que tu as à exprimer au sujet de cet épisode. kéa
SupprimerIl y a l'expérience. On la vit. Elle s'impose. C'est vrai qu'on est réduit et quand ça arrive à 12 ans, à l'âge où un déploiement devrait se faire, c'est pas pareil qu'une épreuve à 70 ans !
SupprimerMais il y a la compréhension et l'analyse de l'expérience, et ça demande quand même bien des années et je ne suis pas sûr d'avoir encore fait le tour de l'ensemble.
Certes comme on m'a dit « tu es devenu adulte avant l'âge » je crois que c'est une réalité. Je le constate parfois dans des reportages à la télé avec l'enfant en grande difficulté de santé, hospitalisé, avec parfois des jours qui sont comptés. Je n'ai pas la même expérience bien sûr, mais souvent je m'y retrouve et m'y projette quelque peu, comme un miroir inattendu.
J'ai vécu de la force intérieure qui m'était donnée alors. Je ne me posais pas tellement de questions sur d'où ça provenaient et des choses du genre. Je me contentais de ce truc vital : je veux m'en sortir ! Je veux remarcher ! Je veux une vie normale ! Je me demande même si je me formulais ça comme ça, mais j'en vivais pleinement, les grands moments merveilleux de progression, les grands moments terribles de souffrance et de désespoir. Et tout cela a fini par s'accomplir. Alors oui, je crois que je porte bien mon nom : « victorieux de l'impossible ».
Et plus ça va, plus je me sens humble petit et vulnérable. C'est peut-être là la vraie force.
"On n'étouffe pas le silence, il y a sans cesse une présence qui le comble pour qui se laisse la ressentir." Suis passée à plusieurs reprises pour te lire ici car cette phrase est infiniment belle et marquante ( ainsi que tout le paragraphe ).
RépondreSupprimerC'est beau, quand les personnes savent parler du silence... Je n'en dirais pas plus, n'étant pas vraiment pour commenter ce qui précède. Belle soirée.
pas vraiment apte, pardon!
RépondreSupprimerC'est toujours avec plaisir et intérêt que je lis tes commentaires ici (et ailleurs)
Supprimersi tu dis que tu es passée plusieurs fois à cause de cette phrase, c'est que tu en perçois toute la profondeur et ça ne peut être que par expérience.
Alors permets-moi de te dire que tes mots démontrent ton aptitude à commenter…
Ce blog est pour que chacun puisse s'exprimer tel qu'il/elle le ressent dans l'instant de sa perception. C'est ce que je fais moi-même en écrivant. Mes billets ne sont jamais ni réfléchis ni préparés à l'avance. Je fais confiance dans mon clavier quand je tape… ( ou quand j'utilise le système de dictée).
Pour dire son ressenti faut juste l'aptitude à le laisser s'exprimer et je sais que tu sais faire !
Voilà c'est juste pour dire de ne pas hésiter, surtout que ce lieu n'est pas beaucoup fréquenté, ce qui me convient très bien.