(suite du billet 81)
La femme Lui dit : « Seigneur, je le vois, tu es un prophète. Alors, explique-moi : nos pères ont adoré Dieu sur la montagne qui est là, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut L'adorer est à Jérusalem. » Jésus lui dit : « Femme, crois-moi : l'heure vient où vous n'irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père.
Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous adorons, nous, Celui que nous connaissons, car le Salut vient des Juifs.
Mais l'heure vient - et c'est maintenant - où les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et Vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père.
Dieu est Esprit, et ceux qui l'adorent, c'est en Esprit et Vérité qu'ils doivent l'adorer. »
*
Dans ce dialogue on voit bien que l'on est passé ailleurs. Fini le petit jeu de séduction d'une Samaritaine qui a déjà cinq maris et pourquoi pas un sixième, ce Jésus, plutôt beau gosse au final. Je dois dire que j'aime à m’imaginer Jésus séduisant — attention, je ne dis pas séducteur, ce qui serait une recherche d'emprise sur l'autre au sens commun du mot séducteur, qu’il y ait des intentions sexuelles ou autres peu importe… le séducteur cherche à dominer, il est le Tentateur qui promet ce qu'il n'a pas et donc ne donnera rien — séduisant, parce que si on ne se sent pas profondément attiré par lui dans un mouvement intérieur assez puissant, alors mieux vaut s'en tenir éloigné parce qu'alors, « le fréquenter » ne peut qu'apparaître que comme une forme de danger en raison de la puissance de vie qui émane de cet homme. Craindre Jésus, craindre Dieu, avoir peur de l'extraordinaire amour proposé, on peut le comprendre, si l'on se méfie de « l'amour», de son existence même (amour illusion des sens, alchimie trompeuse de molécules éphémères), du chemin de bonheur qu’il permet (chemin de don)
Mieux vaut alors changer de chemin et lui tourner le dos plutôt que sans cesse rester le cul entre deux chaises vis-à-vis de cet homme et de son message. Car, il ne faut pas s'y tromper, Jéus appelle sans cesse à une radicalité. Le choix se veut irréversible. Nul ne peut rester longuement dans le« tu veux ou tu veux pas ? »
J'ai fait ce choix-là, parce que plus j'ai fréquenté l'Évangile — moins j'ai fréquenté les églises… —
Plus j'ai été attiré par le dedans de moi, comme un appel irrésistible, comme l’amour partagé dans mon couple, parce que j'ai trouvé-là la route que je cherchais, la lumière dans mes brouillards, l'horizon ouvert, et le bonheur intérieur au présent.
Je peux dire que c’est un choix radical. Ce qui ne veut pas dire que je le vis radicalement, parce que les chemins de traverses sont tout aussi séduisants, sauf qu'ils m'ont toujours conduit, expérience faite, vers des contrées marécageuses et des embrouilles lamentables.
J'en reviens au dialogue proprement dit :
J'imagine qu'il y eut alors une longue explication sur cette histoire qui les divisait : « C’est zoù qu’il faut aller adorer Dieu ? Quel est le bon endroit ? Faut-il aller dans la cathédrale de Paris? Faut-il aller au Mont-Saint-Michel ? Faut-il aller dans une chapelle gothique ?, une chapelle romane ? ou plutôt une basilique souterraine moderne, genre Lourdes ? À Rome ! ça, ça doit être le top !!
C'est fou comme on est capable de discutailler sur des trucs qui sont totalement annexes…
Faut-il plutôt être catholique ? Protestant ? Orthodoxe ? Ou alors l'islam… ?
Et là Jésus se montre particulièrement affirmatif ! Il ne fait pas dans la demi-mesure. Son affirmation est claire, nette, précise, pour ne pas dire assénée…
— Vous adorez ce que vous ne connaissez pas
Et vlan, prend ça dans les gencives !
— les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et Vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père.
Sous entendu, il y en a des faux… suivez mon regard…
Mais que signifie adorer le père en esprit et vérité ?
Adorer, dans le langage religieux c'est rendre un culte à Dieu … franchement, c'est pas trop mon truc. — mon dico précise un autre sens : Manifester un attachement et une vénération admirative et passionnée pour un grand homme
Je m’y retrouve un peu mieux, et en personnalisant la formule pour moi-même, Je pourrais écrire :
— montrer mon attachement, ma gratitude infinie, et mon admiration pour cet homme, rencontré en direct par les récits « inspirés » des évangiles, et rencontré personnellement et intimement au cœur de mon humanité. Ma reconnaissance et mon admiration, c’est pour le chemin qu'il m'a ouvert comme je l'ai déjà dit.
En esprit et vérité,
Pour moi c'est une rencontre qui réside à l'intérieur de soi. C'est comme dans la vie : il y a des personnes que l'on croise, que l'on côtoie, il y a des personnes que l'on Rencontre. Je suppose que chacun voit la différence.
Autrement dit, le lieu n'a pas beaucoup d'importance. Certes on peut lui en donner un a posteriori. On peut faire une Vraie Rencontre, à la sortie de la messe, pourquoi pas… (il paraît qu'il y en a qui y vont encore…), dans une teuf, au bistro, au fond d’un monastère, dans un souk tunisien, sur la plage, dans une soirée amicale, etc…
Une Vraie Rencontre nous transforme maintenant, quand elle se fait. On ressent bien quelque chose à l'intérieur de soi.
C'est là que tout commence, ... ou que tout finit…
On peut alors rentrer dans cette relation, la cultiver, s’enrichir réciproquement, prendre plaisir, aimer, être fraternel, se chérir de coeur à coeur, …. On peut aussi passer à côté… — « On s’appelle ? » on a même pas échangé nos numéros, mais c'est sûr, on va s'appeler… un jour ou l'autre…
Pendant des années je suis passé à côté de la Vraie Rencontre avec Jésus
Oh bien sûr, je le connaissais, on m'avait même forcé à le côtoyer, on m'avait raconté des tonnes de trucs sur lui, pas toujours les mêmes choses d'ailleurs, il était surtout Dieu, et pas vraiment homme, il était surtout homme, et pas vraiment Dieu. Il faisait des miracles, non il faisait de la magie. Et chacun me disait que la perception qu'il en avait était la vraie et la bonne. Les curés surtout me disaient qu'ils avaient l’unique et la seule perception valable de ce Jésus-Christ. Pas la peine vraiment de lire l'Évangile, il suffisait d'écouter les sermons le dimanche à la messe…
Et bien sûr il convenait de leur obéir. Aux curés je veux dire, pas à Dieu…
LaVraie Rencontre (Et là je veux bien adopter les mots de l’évangile : en esprit et en vérité), je crois l'avoir exposée à plusieurs reprises sur ce blog. Je n'ai donc rien à ajouter.
je suis attirée par ce Jésus dont tu nous parles si bien.
RépondreSupprimerMais j'ai peur de m'approcher trop de lui
- peur d'être déçue
- peur que lui ne me trouve pas assez intéressante et ne s'occupe pas de moi (toujours cette peur de l'abandon qu'il me faut apprivoiser, dépasser plutôt
- peur que d'être proche de lui ne soit trop exigeant... rester à une certaine distance me permet de le vivre de loin, et de ne pas m'engager
Il faudrait vraiment que je me décide à entrer en relation intérieure avec Lui: je vais rater quelque chose d'important sinon...je le pressens
Ma réponse va peut-être sembler provocatrice ...
Supprimer- Pourquoi donc vouloir s'approcher de quelqu'un qui te fait peur à ce point et présente tant de dangers ?
Dit autrement :
- Pourquoi projeter sur lui toutes tes peurs, au point de ne pas "pouvoir le voir ni l'approcher" ?
et encore autrement :
- Être aimée est donc si dangereux que cela ?
On dirait que tu as été "encerclée" de plein de "fausses croyances"... (c'est juste une impression que je te livre)
" Être aimée est donc si dangereux que cela ?" me demandes-tu?
Supprimersans doute que oui... j'ai sûrement de bonnes raisons de me méfier quelque peu, compte tenu de certaines expériences de mon passé.
Je sais, je ne devrais pas projeter sur Jésus ces vieilles peurs et ces fausses croyances qui appartiennent au passé
Mais je fais ce que je peux...comme je peux ;-)
En esprit et vérité,
RépondreSupprimerPour moi c'est une rencontre qui réside à l'intérieur de soi. C'est comme dans la vie : il y a des personnes que l'on croise, que l'on côtoie, il y a des personnes que l'on Rencontre
C'est ce que vit la Samaritaine elle vient de faire la Rencontre.
Et dans son cas elle a rencontré et reconnu le maître. Car dans les Évangiles elle reste près de lui et va même jusqu'à lui laver les pieds.
Elle a entendu l'appel qui vient des profondeurs de l'être et a fait le choix de suivre cet appel. Quelle chance! ou quelle soif si grande elle avait pour entendre cet appel.
Elle aurait pu passer son chemin comme beaucoup l'on fait mais non elle a saisi le message.
Nous avons tous cette soif qui a besoin d'être étanchée de l'intérieur encore faut-il la reconnaître, l'accepter et choisir d'y répondre. Nous sommes tous des Samaritaines...
Merci "Anonyme" pour ces propos que je partage.
SupprimerOui, vous avez raison, la soif est intense, nous l'avons tous et toutes.
Il y a des boissons qui ne désaltèrent pas, mais donnent encore et toujours l'envie de boire....
(les limonadiers le savent bien !....)
Il y a la Source dont parle Jésus, qui étanche une autre soif, celle de nos profondeurs avides d'aimer....
elle fait des ardents, et non des repus.
Mais c'est sans cesse à "retrouver en soi"....
Merci de votre passage
Anonyme : Maty
SupprimerBen alors !!!
SupprimerOn ne signe plus ??
:-))
Beaucoup de choses me frappent dans ton texte. Tu parles d'un choix et aussi d'une rencontre.J'ai l'impression d'être encore très loin dans ce chemin .L'important étant surtout pour moi l'amour le choix de l'amour à toujours voir et revoir et la continuelle rencontre avec l'homme de ma vie à savoir mon mari.Jésus je le connais (?) depuis mon enfance, son histoire, sa vie, sa mort tragique, son enseignement.C'est comme si je ne pouvais m'attacher qu'à un être vivant maintenant, en chair et en os, quelqu'un que je peux voir, toucher. Bien sûr je peux lui adresser des prières à ce Jésus, d'ailleurs cela m'arrive encore parfois en cas de souffrance majeure mais c'est auprès d'un humain qu'un début de lumière apparaitra .
RépondreSupprimerLe silence de Dieu est une question à la quelle je ne trouve pas de bonne réponse.
C'est pour cela que je retiens surtout le plus grand impératif de Jésus qui dit" Aimez vous les uns les autres..." qui sous entend: écoutez vous les uns les autres ,aidez vous les uns les autres etc.
Merci Alain pour ce texte lumineux.
".C'est comme si je ne pouvais m'attacher qu'à un être vivant maintenant, en chair et en os, quelqu'un que je peux voir, toucher. "
SupprimerBen oui..... Moi aussi....
C'est ce que disent les chrétiens de la Résurrection....
Il est mort, mais.... nous l'avons vu et touché "après".... témoignent ses proches ....
autrement dit il est Toujours Vivant....
Je n'ai retenu qu'une seule phrase du Curé qui célébra notre mariage :
- A travers [prénom de mon épouse] c'est Dieu et le Christ qui aiment Alain
- À travers Alain c'est c'est Dieu et le Christ qui aiment [prénom de mon épouse]
Cette phrase ne m'a jamais quitté....
Ce n'était au final qu'illustrer une parole de Jésus :
"chaque fois que vous l'avez fait [avait fait le bien] à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait"
Dit autrement : Jésus divinisé ne vit pas ailleurs.... dans je ne sais quelles nuées paradisiaques à 6000 M d'altitude, ou dan un monde parallèle du multivers comme disent les scientifiques aujourd'hui.
IL est LÀ.- ICI - MAINTENANT
Dieu vit dans un Silence Agissant..... agissant : du moins, si on le désire.... sinon il ne bouge pas le moindre orteil !!! (à supposer q'il en ait !!! :-)) )
Enfin, je le vis ainsi..... Ce n'est que ma perception....
Tu écris : "En esprit et vérité,
RépondreSupprimerPour moi c'est une rencontre qui réside à l'intérieur de soi. C'est comme dans la vie : il y a des personnes que l'on croise, que l'on côtoie, il y a des personnes que l'on Rencontre."
Mais à mon avis cette rencontre qui réside à l'intérieur de soi nous pousse à aimer ceux qui sont à l'extérieur... A moins que tous ceux qu'on aime en esprit et en vérité fassent partie de notre vie intérieure... ce que je crois.
Je suis d'accord avec ton texte à 100%.
Toi et moi habitons des lieux différents, mais l'heure vient et c'est maintenant où le Nom de Jésus nous permet de nous rejoindre alors que nos positions respectives pourraient nous séparer... Nous ne nous rejoignons ni au Temple, ni sur une Sainte Montagne mais grâce à internet ! Et grâce aux paroles vraies que tu nous délivres ! C'est le lieu et l'heure où "le Père est adoré en esprit et en vérité"... ça c'est génial !
"Mais à mon avis cette rencontre qui réside à l'intérieur de soi nous pousse à aimer ceux qui sont à l'extérieur..."
SupprimerMerci de ce que tu complètes....
C'est pour moi tellement évident, que je ne l'ai pas exprimé, et cependant c'est essentiel.
Les "vrais rencontres" que j'ai faites m'ont toujours poussé à l'existence et à l'engagement.
Elle sont toujours à voir avec notre "mission d'existence"
Et celle de Jésus m'a fait faire quelques girations imprévues....
Si l'amour ne nous propulse pas un petit peu à l'engagement et au don de soi libre (qui n'a rien d'aliénant ou d'obligé (on est serviteur libre et pas esclave asservi), alors.... je crois qu'il moisit !
À propos de "séparer" :
Tant qu'on ne retrouve pas ce qui unit par le fond, alors on ne peut durer ensemble et la division est toujours proche.... d'autant que nos options sont différentes c'est assez clair !
Et j'aime reprendre ce que tu dis : " les paroles vraies délivrent".
Je me pose toujours la même question à propos des paroles que les évangélistes rapportent comme ayant été dites par Jésus lui même. Comment pouvoir en effet retranscrire tout le dialogue entre Jésus et la Samaritaine ?Il n'y avait pas de témoins que je sache ou alors Jean écoutait aux portes avec un enregistreur? Il n'existait pas en ce temps là: il n'y avait que la mémoire. Quand on sait quel tour celle çi peut parfois nous jouer...
RépondreSupprimerPour ma part je crois que ce dialogue est une pure création de l'esprit de l'auteur : ce qui n'enlève rien à sa beauté et sa profondeur.
Chaque évangéliste met sa touche personnelle dans ses écrits.
Je ne pense pa que on puisse prétendre que les paroles de Jésus résultent de procès verbaux d'audition...
RépondreSupprimerJe ne partage pas non plus qu'il puisse s'agir d'une fiction de l'esprit
C'est l'aventure d'une rencontre entre un être singulier et un groupe d'hommes et de femmes qui témoignent de celle-ci
Curieusement 20 siècles plus tard d'autres humains se sentent appartenir à cette même aventure...
Oui tu as raison.Si 2000 ans après sa mort, des millions d'êtres humains se sentent en communion grâce à et par cet homme c'est qu'il y a du divin du surnaturel du... je ne sais comment m'exprimer...
RépondreSupprimerJ'ai écrit un peu trop vite...
Hier j'ai regardé une émission sur TV 5 monde intitulée " Les derniers jours de Jésus"J'ai beaucoup appris.
La question que je me pose souvent : pourquoi des hommes ont décidé de "parler de lui", écrire une histoire mêlant historicité et démarche spirituelle, bien des années après sa mort , et pourquoi ont-ils tellement tenus à prendre des risques "pour lui et son message".
SupprimerVu les écrits produits, qui ne sont quand même pas de la bouillie pour chat, ils n'étaient pas tous des illuminés sous canabis ou des rigolos avides de faire parler d'eux, d'autant qu'il n'y avait guère de médias, de cam de TV et autres internets à selfies ...
Qu'avaient-ils vraiment "compris" après des années de recul nécessaire à .... comprendre...