Seuls existent les commencements,
les aurores nouvelles,
qui nous tirent de nos nuits.
Être toujours voyageur de l'Aube.

mardi 10 août 2021

118 - La tempête apaisée.

 Relecture du début de mon billet 117 (le précédent), à propos de cette sorte d'assainissement qui se déroulait progressivement en moi. Tout à coup m'a traversé : « la tempête apaisée », la mienne en quelque sorte, et puis très vite j'ai pensé à l'épisode éponyme de l'Évangile, que je suis allé relire.


On connaît l'histoire : Jésus monte dans une barque avec des disciples. C'est souvent pour s'éloigner de la foule, être au calme, ou pouvoir leur parler à une certaine distance. Là à priori c'était pour se reposer, puisqu'il s'endort…

Une tempête arrive qui secoue sérieusement la barque de pêche. On sait ce qu'il en est de la violence des tempêtes parfois sur les lacs. Elles arrivent sans crier gare.

Les disciples ont la trouille de leur vie et ils réveillent le Maître : — « Sauve-nous, nous sommes perdus ! »

En fait c'est une histoire de trouille !

Jésus, qui à mon avis ne doit pas être très content qu'on l'ait réveillé durant sa sieste, mine de rien, leur passe un savon : — « M'enfin, c'est quoi cette trouille, homme de peu de foi ! »

Alors la tempête s'apaisa dit l'évangéliste et le calme revint.


On a appelé ça un miracle.

Pourquoi pas ? Le miracle c'est : comment on apaise une tempête sous un crâne ! Parce que finalement c'est ce dont il s'agit. La perte de confiance totale. La panique. L'oubli que la barque en a connu d'autres sans jamais couler. On imagine que certains étaient prêts à se jeter à l'eau pour se sauver mais finir par se noyer. Et quel est donc ce Jésus qui garde son sang-froid ? Qui garde l'équilibre et se tient droit face aux flots.

L'histoire dit qu'il menaça les vents et la mer. Je n'y étais pas. Je veux bien croire à la symbolique de la mer qui inspire la terreur au temps de la Bible, les dieux qui l'apaisent et même le Dieu d'Israël qui ouvrit la mer Rouge pour que le peuple en esclavage accède à la liberté.

Va pour les symboliques.


Mais j'aime mieux la force d'un être qui par sa seule présence à l'intime de nous à une capacité d'apaisement de nos trouilles, nos paniques, des dangers supposés et que l'on se plaît à gonfler en se bourrant le mou les uns les autres. Pensons à ces situations de panique qui font de nombreux morts parfois alors qu'il n'y avait pas de danger réel et que c'est la panique elle-même qui créa la catastrophe.

Si miracle il y a, c'est celui-là, celui de la puissance des êtres de vérité et de sécurité, en qui on ressent que l'on peut faire confiance et que l'on a raison d'avoir foi en eux.


C'est en moi qu'il y a des tempêtes à apaiser.

Et c'est Lui mon compagnon d'apaisement. Simplement parce que je le fréquente et que je ressens combien la « foi en lui » génère un apaisement. Et que chaque fois que je m'éloigne dans des arguties, des plaidoyers, des procès sans accusés, je continue à me fourvoyer, alors qu'il est temps de signer des armistices. Pas encore la paix finale. Mais, avançons pas après pas.


———————


Il monta dans la barque, et ses disciples le suivirent. Et voici, il s'éleva sur la mer une si grande tempête que la barque était couverte par les flots. Et lui, il dormait. Les disciples s'étant approchés le réveillèrent, et dirent: Seigneur, sauve-nous, nous périssons! Il leur dit: Pourquoi avez-vous peur, gens de peu de foi? Alors il se leva, menaça les vents et la mer, et il y eut un grand calme. Ces hommes furent saisis d'étonnement: Quel est celui-ci, disaient-ils, à qui obéissent même les vents et la mer?

(Matt,8,23 et s.)


13 commentaires:

  1. bonjour Alain et oui tu as bien compris, les tempêtes sont en soi et c'est à nous de les calmer. Mais l'esprit peut beaucoup de choses, je te raconterai une anecdote dans mon nouveau blog, et oui encore un, tu trouveras le lien sur le blog "memoiredupasse" Notre cerveau mentalise trop et aussi nous écoutons trop l'entourage qui parasite tout. Si on s'écoutait seulement soi tout irait mieux mais encore faut il y arriver... Bonne journée.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Sans doute faut-il apprendre ce qu'il y a à écouter en soi, c'est-à-dire qui parle en soi ? Et de quoi ?
      Si on écoute seulement soi, on se ferme à la réalité de l'extérieur dans lequel on baigne, qu'on le veuille ou non, notamment la présence incontournable des autres. (Même sur l'île déserte les autres sont là…)
      C'est tout le problème des niveaux de conscience et de la tyrannie du « petit moi » qui génère les fermetures et les égocentrismes.
      L'antidote est la « conscience profonde éclairée », mais ça, la société s'organise et fait tout ce qu'elle peut pour qu'on n'arrive pas à ce niveau-là.
      Ce serait terrible pour le commerce capitaliste qui domine la planète.… D'autant que nous en bénéficions chaque jour…
      Vivre est d'autant plus simple que c'est compliqué…

      Supprimer
    2. "Hineinhorchen", comme disait Etty

      " Le sentiment de la vie est si fort en moi, si grand, si serein, si plein de gratitude, que je ne chercherai pas un instant de l'exprimer d'un seul mot. J'ai en moi un bonheur si complet et si parfait. Ce qui l'exprime encore le mieux, ce sont les mots: "se recueillir en soi-même"
      (...) Même un corps maladif n'empêchera pas l'esprit de continuer à porter ses fruits. Ni de continuer à aimer, à être à l'écoute de soi-même, des autres, de la logique de cette vie. Hineinhorchen, "écouter au-dedans"

      Supprimer
  2. Bonjour Alain
    MERCI.
    Tes mots me font du bien, et même, arrivent à point nommé. Je crois que je me suis un peu trop éloignée de cette Paix bienfaisante ces derniers mois et qu'"il est temps pour moi d'y revenir.
    Merci.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. S'éloigner de cette Paix… c'est toujours notre tentation. C'est nous qui nous éloignons de quelque chose qui a une présence permanente.
      C'est très bien ainsi d'ailleurs. Car nous détenons le pouvoir de s'en rapprocher ou de s'en éloigner.
      Accuser la Paix de « s'en aller » c'est un très mauvais procès bien commode pour nous !

      Karl Rogers, psychologue clinicien humaniste américain, un de mes maîtres, considéré comme l'une des sommités de la psychologie du XXe siècle, a établi, de sa pratique clinique, qu'au-delà des perturbations et problèmes des personnes, fussent-ils graves et invalidants, il existait une zone de paix permanente, qui demeurait accessible. L'un de ses livres importants : « le développement de la personne » ( On Becoming a Person). Aujourd'hui ça semble assez évident. Mais en 1961 on pensa qu'il racontait vraiment n'importe quoi ! Les gens gravement si perturbés ne pouvaient connaître aucune paix…
      alors qu'il suffit de leur en indiquer le chemin…
      C'est dire si dans le domaine de la psychologie humaniste on revient vraiment de TRÈS loin !…
      Alors, chère Ambre Neige, comme tu dis il est temps d'y revenir. C'est là, à portée de conscience et de ressenti. Je t'assure qu'il ne faut pas des années de méditation pour y arriver.… Très modestement, je sais de quoi je parle.

      Supprimer
  3. Nous avons un voisin assez perturbé ! pas trop près de chez nous heureusement mais quand meme. Il peut se mettre à crier à tout moment du jour ou de la nuit. Des hurlements ou des sortes de jappements chargés de violence. Des bouts de phrases incompréhensibles ou l'on discerne parfois le mot guns. Il semble se battre avec des ennemis invisibles.
    Alors l'histoire de la tempête apaisée je la vis souvent. Ce matin par exemple, seule à la maison, sournoisement mon mental a commencé à élaborer des scénarios très sombres que j'ai démontés assez rapidement en me posant la question : "En quoi veux tu mettre ta confiance ? en ton imagination ou en Cela qui a toujours pris soin de toi ?" Et me voilà aussitôt revenue dans la "zone de paix permanente", par sa grace uniquement.
    Mon voisin aurait besoin d'une guérison miraculeuse comme "Légion" que Jésus a délivré de ses démons. Nous avons tous des démons desquels nous avons besoin d'être délivrés pour redevenir "un". Ce sont de fausses identifications qui font que nous sommes plusieurs, qui font que nous sommes tous plus ou moins "légion" plutôt que "un". kéa

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'aime beaucoup ton commentaire, kéa, comme souvent d'ailleurs.
      Tu illustres avec justesse par des faits personnels ou dans ton environnement. L'analyse est pertinente. En particulier le choix délibéré (au sens de la décision qui a pesé les éléments, comme on délibère dans un prétoire ou une assemblée) de se diriger en soi vers le meilleur pour soi. Tu évoques « la grâce » de Cela. J'ai encore du mal avec ce mot trop encore terni des couches de pollution d'enfance et de jeunesse qui restent à décaper. Je cherche encore un synonyme qui me conviendrait en attentant la remise à neuf du mot lui-même.

      Quant à ton voisin il a sans doute besoin de soins pour une délivrance. C'était un don que Jésus incarnait celui de la délivrance pour, comme tu le dis avec des mots que j'apprécie « redevenir "un"»
      Merci pour ce commentaire pertinent.

      Supprimer
  4. Chaque fois que je lis un texte de toi, j'ai la même heureuse évidence de la foi qui t'anime et qui me rejoint dans ma propre expérience. Il me semble que ce que tu écris est vrai de tout texte d'évangile : ils mettent en scène (rendent visible)ce qui habituellement n'apparaît pas mais qui travaille la vie de chacun en ses profondeurs. Aussi, je lis comme toi cette tempête apaisée comme celles qui nous assaillent bien souvent dans la vie. Effectivement, pour moi aussi Jésus les apaise. Mais je suis sensible à un autre aspect : il dort et pendant son sommeil les flots gonflent et mettent l'embarcation en péril. Combien de fois ne me suis-je pas adresser au Christ en lui disant : merci pour l'apaisement mais pourquoi as-tu dormi si longtemps pour le faire?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci pour ton commentaire, Christine, ils me sont toujours précieux.
      Ta question à la fin, concerne un aspect auquel je ne me suis pas arrêté. Et cependant ta question est d'importance. C'est comme une invitation à y revenir.
      La question est importante parce qu'elle en pose plein d'autres…
      — pourquoi l'ont-ils réveillé au lieu de gérer par eux-mêmes leurs propres peurs ? En sont-Ils incapables ?… Peut-être… peut-être faut-il toujours « un autre »…
      — est-ce que je (nous) n'ose pas aller le chercher pour toutes sortes de mauvaises raisons ?
      — Est-ce que je préfère plutôt une sorte de « foi en moi » (je m'en sortirai par moi-même, seul…) plutôt qu'une « foi en lui » qui ne sera jamais insensible à mon appel ?
      — Est-ce que parfois il faut crier très fort pour le sortir de son sommeil ?
      J'ai connu des périodes dans ma vie ou plutôt que d'appeler, je me lamentais comme
      avec cette parole « pourquoi m'as-tu abandonné ? »

      Ta question est loin d'être anodine.
      Tu es bien souvent au carrefour de l'interpellation… :-)
      Je ne peux que t'en remercier.

      Supprimer
    2. Toi aussi Alain tu soulèves une question qui m'interpelle assez et je te cite : "ne sera jamais insensible à mon appel". Lorsque Jésus sur la croix dit : "Père, pourquoi m'as tu abandonné ?" je me dis, si même lui se sent abandonné, qu'en est-il de moi ? Cela soulève de ma part une inquiétude pour l'avenir sur le chemin. kéa

      Supprimer
    3. Est-ce que celui que jésus appelle Père a véritablement abandonné ce fils ? Où est-ce que Jésus ressens, pense, qu'il est abandonné ? Ce n'est pas tout à fait la même chose. Est-ce que cette parole n'est pas un sentiment humain que nous connaissons tous un moment ou un autre ? Se sentir abandonné de tout et de tous. Ce sentiment peut correspondre à une réalité. On a pu être effectivement abandonné, délaissé dans l'épreuve. Je pense à une femme agricultrice qui à la suite d'un accident de tracteur s'est retrouvée tétraplégique. Je l'ai connue dans un centre de rééducation, et de fait, son mari l'a abandonnée, pour une autre femme afin de poursuivre l'exploitation agricole.
      Mais le sentiment d'abandon peut ne pas correspondre à la réalité. « On se sent » abandonné, et pourtant on ne l'est pas, et en tout cas pas à la mesure qu'on le croit. Moi aussi j'ai vécu ce sentiment vis-à-vis du divin lorsque la polio m'a paralysé. Je l'ai appelé, il ne répondait pas.
      Et pour autant j'ai fait l'expérience qu'en fait il avait toujours été présent. C'est encore vrai aujourd'hui.
      Je suis toujours très touché par ces paroles de Jésus. Elles sont d'une telle grandeur d'humanité. Elles reprennent tellement des aspects de la condition humaine et de l'aventure de humanité.
      Jésus n'est pas un gourou ni un magicien. Il est un homme parmi les hommes qui donne toute sa vie, et qui ressent tous les registres de l'humain.
      (je suis toujours et éploré quand on le représente comme un dieu–magique, qui claque dans ses doigts et Hop il fait illico une multitude de miracles… Quelle bêtise !)
      Je ne sais si mes propos te feront sortir d'une zone d'inquiétude. Je l'espère en tout cas.

      Supprimer
  5. N'ayant pas vécu de situation aussi dramatique que la tienne, j'ai malgré tout traversé qq périodes d'intense sentiment d'abandon. Alors oui je sais à quoi Jésus fait référence. Et pour moi c'est toute la symbolique de la crucifixion qui me parle de mon propre cheminement. En premier je vivais un fort sentiment d'avoir été abandonnée, ensuite la mort d'une version très limitée de moi-meme ce qui a provoqué un grand deuil et une descente aux enfers. Pour Jésus la descente a duré trois jours mais à une période de ma vie ca a duré au moins deux ans. Ensuite, au plus creux, une profonde prise de conscience a émergé et je suis littéralement ressuscitée. Il est clair pour moi que d'autres résurrections plus ou moins intenses m'attendent sur le chemin. C'est ainsi que je donne sens à toute cette histoire, parce au sens littéral, je ne comprendrais vraiment pas que Celui qui montre la voie finisse dans un désarroi total. Moi, à mon dernier souffle, je veux pouvoir dire : Merci ! Merci pour ce voyage si grandiose, pour tout ce que j'ai vécu, merci de m'avoir montré, m'avoir fait comprendre, m'avoir amenée à toi. kéa

    RépondreSupprimer
  6. J’ai beaucoup lu et écouté les souvenirs des réfugiés vietnamiens survivants de l’exode en 1975. Surchargés sur des embarcations de fortune, affamés, en pleine mer, en pleines tempêtes, entourés à 20 m de pirates sanguinaires et violeurs, tous se sentaient abandonnés. Tout le monde priait. Il n’y a pas de pires exemples de dangers et d’abandon.

    RépondreSupprimer

Si vous avez des difficultés à poster un commentaire ou si celui-ci n'apparaît pas, vous pouvez me l'adresser à : alainxenreve (at) yahoo.fr
Merci.
Je le publierai en votre nom.