Seuls existent les commencements,
les aurores nouvelles,
qui nous tirent de nos nuits.
Être toujours voyageur de l'Aube.

jeudi 4 novembre 2021

119 — À propos de comportement



« J'ai délaissé ce blog depuis août », c'est l'expression qui me vient en reprenant contact « avec lui », comme si je le personnalisais. C'est vrai que d'une certaine manière il représente une part de moi-même. Mon autre blog est assez relationnel, celui-ci est fondamentalement méditatif, mais en présence de qui veut bien venir ici. J'en avais expliqué les raisons au tout début. Elles demeurent.

Depuis le 10 août, date du dernier billet, ça ne fait même pas trois mois. Alors pourquoi je dis délaissé ?


Je me dé-laisse spirituellement moi-même dans l'ordinaire des jours. Insuffisamment relié à l'essentiel,  distanciant le contact. C'est assez imperceptible au début, il y a tant à faire, à s'occuper, à se préoccuper, à répondre, à gérer. Il y a tant de sollicitations qui reviennent, d'attentes auxquelles on croit qu'il faudrait répondre, et d'autres choses du genre.


Peu à peu le laisser-aller s'installe de lui-même et prend ses aises.

Bien sûr il y a des moments plus forts où la relation à l'Autre et présente et même parfois intense. Mais c'est comme une visite occasionnelle d'un ami intime. On est heureux de se retrouver, et puis plus rien jusqu'à…  on ne sait pas quand.

Il faut entretenir l'amitié dit le dicton, il faut entretenir l'intériorité de la même manière.

Il n'y a d'existence vraie que dans la relation.

C'est vrai pour moi, c'est vrai pour l'Autre, enfin il me semble. Son existence n'est pas en cause ontologiquement, mais sa vitalité agissante n'est pas possible si je ne me mets pas en relation. Si je dé-laisse.

Imbécile que je suis, j'avais oublié cette essence.


C'est aussi une question de rythme de vie, d'habitus. Je ne sais s'il faut parler de discipline, mais peut-être. L'antiquité grecque parlait de « hexis » d'habitudes rattachées  à une vertu pour le bien de l'homme. Bourdieu évoque des dispositions réglées acquises tant par contrainte que par ajustement spontané conformément à ses aspirations propres. Et tout cela s'inscrit dans une dimension collective même si elle ne concerne que chaque individu en propre.


Sans vraiment m'en rendre compte j'ai abandonné certains comportements spirituels qui me faisaient le plus grand bien, tels que la centration méditative, l'imprégnation, l'écriture strictement personnelle des ressenti les plus profonds, le contact intime avec l'Évangile comme support, etc.

M'apparaît tout à coup la nécessité de reprendre une discipline dynamique dans ce domaine. Pas forcément quotidienne, mais régulière. Il est évident que cela me fera le plus grand bien. 

Mais où avais-je donc la tête et le cœur ?


14 commentaires:

  1. Je ressens ton billet Alain qui me parle, tes mots qui courent fluides sur la page délestée de trop de lourdeurs, et expliquent tes absences, tes instants qui s'éloignent de soi, de l'Autre, s'éclipsent et rebroussent chemin tout naturellement.

    J'éprouve également ce besoin de m'esquiver sur la point des pieds, pour mieux revenir, toute neuve, apaisée, en parlant des brins de nous qui s'écoutent simplement sur la page demeurée silencieuse, et qui re-vivent plus grandement en'coeur.

    Le Dieu Amour va et vient, lointain, silencieux ou proche, guetteur attentif de nos épreuves. Peut-être !

    merci Alain pour "ce voyageur de l'aube" où "seuls existent les commencements,
    les aurores nouvelles, qui nous tirent de nos nuits".

    Douce journée.

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    1. Un grand merci pour ta méditation. Tu soulignes nos atermoiements inévitables. S'esquiver et revenir, parce que au final on ne peut faire autrement.
      Ton évocation du titre de ce blog me rappelle qu'il s'est imposé à moi lorsque je l'ai créé. Finalement l'aurore est toujours à la frontière pour nous tirer de la nuit.
      Le voyageur de l'aube et peut-être sans cesse à cet endroit-là. À la fois un voyage immobile, en même temps toujours actif…
      merci pour ce commentaire si juste.

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  2. merci Alain
    également proche de ton texte
    en écrivant on descend à l'intérieur de soi et on goute d'exister
    Amitiés
    Michèle

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    1. Merci de ta fidélité à ce blog. Cela me touche beaucoup. En raison du dialogue que nous avons eu une certaine époque. Ce fut pour moi très important.
      L'écriture m'aide énormément pour descendre en moi. Elle doit certainement m'être aussi nécessaire qu'une échelle de corde pour un spéléologue !
      Amitiés partagées.

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  3. Pourquoi s'éloigner de ce qu'on a de plus cher ??? Peut être parce que d'y rester demande un effort, une constance, un momentum à garder peu importe les circonstances. Alors que de se laisser attirer par tout et n'importe quoi ne demande pas d'effort, ne demande pas de choisir de le faire. Tandis que garder mon focus sur ce qui vibre pourtant si fort en moi me demande de le choisir. "CELA" est pourtant ma passion à moi. Par contre il sont très rares les matins ou je ne prends pas une demi heure, une heure et parfois plus pour descendre au plus profond que je le peux en moi-même. Pour moi c'est essentiel et une fête à chaque fois. J'aime beaucoup ton texte. Il est si pertinent et inspirant. kéa

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    1. Mon père disait : « partisan du moindre effort ! ». On peut comprendre quand il est question de choses difficiles à accomplir ou ardues. Mais pour ce qui est censé apporter de profondes satisfactions…
      parfois nous ne sommes pas une contradiction près…
      enfin, pour ma part, je le constate…

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  4. S'intérioriser demande un effort. Je suis d'accord. Le " quotidien " nous happe et nous éloigne. Après ma journée de travail je suis souvent trop occupée ou trop fatiguée pour prendre le temps de "me retouver". Un jour j'ai dit à une personne qui pratique la méditation régulièrement que c'était un luxe. Elle m'a répondu que j'avais raison. Et bien vivement la retraite pour accéder à ce luxe ( ou pas).
    Belle journée à toi

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    1. Eh bien, je suis à la retraite… et pourtant je me prive de ce que tu appelles « luxe » !
      Alors n'attend pas cette époque pour t'offrir des temps de méditation…

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  5. En cette dernière étape de ma vie, je ressens de plus en plus le besoin de "se relier à l'essentiel"
    Mais pourquoi nous laissons-nous si souvent distraire par des choses secondaires?
    Merci pour ton commentaire: il m'a fait du bien

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    1. Tu évoques d'être distraite par des choses secondaires. Je comprends très bien ça. Et je me pose la question comment les relier à l'essentiel ? Je me la pose pour moi-même. C'est venu en te lisant. Bien entendu il existe le futile. Mais si au fond de nous tout cela pouvait peut-être se relier en un même faisceau.
      Je pense au marchand de ballons, et son faisceau de fils. Au bout de chacun un ballon de couleur différente qui fait un ensemble magnifique. Et tout cela dans une même main. C'est un peu une métaphore, mais elle me donne à réfléchir.
      Alors merci pour cette interrogation qui m'interpelle… et peut-être toi aussi…
      Et mon grand souhait, qui n'est pas secondaire, c'est que tu retrouves bientôt ton chez toi en bonne santé.

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    2. Ton image de la main qui tient les ballons me fascine ! Je vois la main comme la source et les ballons comme les manifestations multiples et colorées de la source. Tout est Un, c'est moi qui voit des objets séparés. kéa

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    3. Tout vient de Un et jaillit en nous de manière multiple et colorée. Si je reste dans la métaphore nous avons le choix des ballons, on est libre d'en faire ce que l'on veut. Mais tout vient de Un. En effet.

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  6. Curieusement, c'est souvent sur mon ordi c'est à dire en écrivant que je tente d'entrer en connexion avec moi! Et cela m'apaise. La lecture aussi m'apaise. Ces derniers temps je relis presque tous les livres d'Emmanuel Schmitt.Ces livres me font du bien.J'en ai besoin . Car j'ai un défaut : J'ai l'art de me construire souvent des scénarios catastrophes qui ne me font pas du bien .
    Depuis quelques temps je lis aussi souvent l'évangile du jour ; D'ailleurs cela me donne une idée alors que je t'écris : je vais la lire tout de suite. Merci Alain pour tes écrits qui font tant de bien.

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    1. L'écriture est un très bon moyen de se connecter à soi. Et pas uniquement l'écriture introspective. Quant à la lecture, tu as bien raison, lire et relire les auteurs qui nous font du bien. Et dans ce domaine je pense que l'Évangile est un must ! Peut-être à condition de laisser tomber le fatras de tout ce qu'on a pu raconter et gloser à son propos. Une bonne lecture c'est chaque fois nouveau.
      Je parodierais volontiers une chanson de Jean Ferrat : « je peux ouvrir 100 fois tes pages, c'est toujours la première fois »… ;-)

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