Seuls existent les commencements,
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qui nous tirent de nos nuits.
Être toujours voyageur de l'Aube.

lundi 16 décembre 2013

66 - Bon maître ? (En guise de suite au billet 65)


Difficile sans doute de se débarrasser des représentations multiples qui encombrent le cerveau, agacent la sensibilité, et poussent à la révolte contre l'oppresseur… (le chef, le supérieur, le directeur, le dominateur, le despote, le censeur, le dictateur, etc. etc.)
il se fait que j'ai eu la chance de côtoyer un « bon maître ». (J'en ai parlé ailleurs à une certaine époque…). 


Le bon maitre, conduit au Maître, le Maître intérieur/extérieur
Le bon maître s'efface à mesure que le Maître investit l'être, l'âme.
Ce qui suppose que le disciple engage sa liberté… J'allais dire… Librement…

Je le qualifie de "bon" parce qu'il n'agit pas pour son propre compte. Il est lui-même au service et ne cherche nul disciple, encore moins à exploiter quoi que ce soit de l'autre.

Il m'a ouvert à ma vérité et ma liberté. 
Il m'a fait comprendre que l'on reçoit d'un autre que soi-même.
Que l'on n'est pas redevable envers le donateur.
Ce n'est pas contractuel. Ce n'est pas un donnant-donnant.
Ce n'est pas un : — je t'aime si tu m'aimes.

C'est peut-être cela le plus difficile à admettre. La généreuse gratuité. Sans doute faut-il arriver à effleurer le réel divin qui n'est QUE don d'amour. Et rien d'autre que cela. Il lui est IMPOSSIBLE d'être autrement. 
Ainsi EST ontologiquement l' « Être de Dieu ».
Sans doute est-ce cela le sommet de la foi.
Vers ce sommet je me sens souvent tel un Sisyphe, redégringolant avec son rocher du doute… 

Pourtant, le service, le don de soi généreux, et surtout, surtout, le bonheur qui l'accompagne, je l'ai vu vivre durant plusieurs années par une personne avec laquelle je travaillais. Une forte personnalité, quelqu'un qui était tout sauf servile, et qui demeura et demeure toujours pour moi un modèle du don de soi heureux. Ça se voyait, cela animait sa vie et en plus il était d'une efficacité redoutable…
Il n'a pas su grand-chose de mes pensées divines à son sujet : je me disais souvent voilà quelqu'un qui est un reflet de ce que peut être un amour divin.
 J'ai vécu près de lui une intense fraternité, au sein d'une tache commune et complémentaire qui nous liait. Je n'ai jamais parlé de lui ici ou ailleurs. Presque par respect. Il n'aurait pas du tout aimé… Lorsque j'évoquais son sens intense du service, il me disait souvent : « — nous avons à être des serviteurs quelconques ». Il faisait allusion à un passage de l'Évangile :
— Quand vous avez fait tout ce qui vous a été ordonné dites : Nous sommes des serviteurs inutiles, nous avons fait ce que nous devions faire.  

Il y a comme cela des personnes dont la seule observation de leur vie est un véritable enseignement d'un essentiel.

*
Je me suis laissé écrire. C'est un peu décousu. Et pourtant je touche peut-être à ce qui est le plus fondamental. Je veux dire fondamental pour moi.
Pour d'autres, je ne sais pas.

14 commentaires:

  1. Oui, et ça prend les yeux pour voir
    d'autres sont sans doute passés sur la même route que toi sans rien remarquer
    et ont même pu prêter de mauvaises intentions à cette personne
    c'est toujours soi qu'on voit dans le miroir
    faut se souvenir que c'est ce qui est arrivé avec Jésus
    on lui a prêté toutes sortes d'intentions qu'il n'avait pas
    seuls ceux qui avaient les yeux pour voir ont vu
    et ils n'étaient qu'une poignée
    ce n'est pas différent aujourd'hui. kéa

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    1. Tu as tout à fait raison, il y a vraiment une question de regard…
      Je dirais même un double regard :
      un regard sur le vis-à-vis dont on peut ressentir les intentions profondes (tout comme on peut déceler qu'il porte un masque, avec des intentions cachées…)
      Un regard sur soi-même, sur l'intérieur de soi, où l'on ressent quelque chose du genre : mais oui ! C'est tout à fait cela que j'attendais…

      Aujourd'hui, c'est l'impression qu'il y a une grande faille dans la société ambiante : comme si plus personne n'était crédible sur quoi que ce soit… ( Je généralise un peu… Mais pas tant que ça…)
      Un monde de personnes en permanente suspicieuses.
      C'est à la fois triste et grave quelque part…

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    2. "...comme si plus personne n'était crédible sur quoi que ce soit… "
      Je considère cela comme un moment d'hésitation entre deux marches. Nous avons trop mis notre foi dans ce qui ne la méritait pas, alors là on se retrouve un peu débalancé, un peu trop dans l'autre extrême.

      Je pense que le cœur voit clair et que lorsque Jésus est arrivé, les gens l'ont reconnu au niveau du cœur. Ils l'ont acclamé. Ensuite la petite machine dans la tête s'est mise à peser et soupeser "oui mais... oui mais..." et avec l'aide de ceux qui avaient grand intérêt à l'éliminer, ils se sont mis à tant le détester que même Barabbas leur parût moins haïssable que lui.
      À moins d'apprendre le langage du cœur je ne crois pas en l'avenir de l'espèce humaine. kéa

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    3. Je partage tout à fait ta dernière phrase. L'abandon du coeur et le grand péril de l'Humanité.
      éclairant aussi ce que tu dis avec justesse : être touché par le coeur, puis être repris par le raisonnement et les certitudes intellectuelles anciennes (et l'attrait pour le pouvoir).

      C'est finalement pas si facile que cela la confiance dans la clarté du coeur.
      Souvent, hélas, l'histoire affective personnelle a installé une méfiance à cet égard.

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  2. Ce texte n'est pas si décousu que cela car en fait c'est très difficile de parler de tout ce qui touche à l'essentiel. Et je saisis bien ce que tu peux évoquer en profondeur.
    Parfois je me suis entendue dire (intérieurement) que je n'étais rien moins que rien et pourtant tout quand même.Curieux ce ressenti!
    Si je n'existais pas et si l'autre, tous les autres non plus n'existaient pas , il n'y aurait pas de monde dans le MONDE ! Alors où serait le sens de la vie? Chacun détient sa vérité qui rejoint la VERITE.
    Est-ce que rien ne peut séparer l'homme de l'Homme que sa pensée parfois voilée???
    Il m'est arrivé de rencontrer de ces personnes au service pour le service. Je m'étonnais alors de ne rien leur devoir en retour mais j'ai compris que ce que tu reçois sans te sentir coupable d'être redevable, permet ainsi à l'autre de donner sans rien attendre en retour. Le don devient JOIE, avoir servi un frère tout simplement , c'est alors un acte d'amour. Celui qui apprend à recevoir, à son tour pourra faire don de son temps, de son talent, de sa personne envers un autre, un autre jour, en un autre lieu, en un autre temps!, d'une autre manière....
    C'est peut-être ainsi que pourrait se créer une sorte de chaîne humaine agissant dans le donner gratuit.!
    De ce que j'ai reçu gratuitement, je peux alors donner gratuitement. c'est un chemin vers soi en même temps que vers l'autre, et vers le Tout Autre qui nous donne simplement la JOIE d'ETRE !
    On est soi-même parfois entouré de ce bon maître dont tu parles, c'est celui par qui la parole se donne pour aider l'autre à éclaircir son regard, à déboucher ses oreilles, à entrer dans un silence actif ( ceux qui ne disent rien ont parfois rien que par leur écoute aidé l'autre à cheminer, progresser dans sa propre pensée pour le conduire à sa vérité, tu dois bien savoir cela pour en avoir fait l'expérience ! ) La clé de ce mystère est en nous et le Maître nous fait toucher le sommet de la Joie, fruit du travail de l'homme aussi!
    Merci pour ce partage.
    Brigitte

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    1. Dans ton commentaire, je souligne particulièrement ce double mouvement : — ne pas se sentir redevable d'avoir reçu gratuitement. — Donner sans attendre le retour (même si on reçoit quelque chose qui est autre et que tu appelles la JOIE).
      Je crois que ces moments-là existent plus qu'on ne croit. À condition d'y prêter attention.
      Je parle du quotidien ordinaire. ( Ou moins ordinaire… !)

      Je crois beaucoup plus à cela qu'à des signes extérieurs d'ampleur qui sont souvent de la mousse qui par nature est toujours éphémère…
      J'aime les grandes causes… Qui sont toutes petites…

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  3. le maître a toujours à voir avec le père .Comme un bon père, le maître regarde l'autre s'affranchir, grandir,devenir lui même et libre.Le maître s'efface comme tu dis...C'est parfois difficile de quitter le maître c'est parfois si bon d'être sous son aile on se sent en confiance et état de protection... Pourquoi avons nous toujours besoin de protection ?de quoi donc avons nous si peur ?
    C'est tellement plus facile de rester dépendant mais cela ne mène pas bien loin. Un jour il faut faire le pas qui conduit une liberté le pas qui mène à être a son tour un maître pour un autre qui en a besoin...
    Il ne s'agit pas tant de rendre ce qu'on a reçu mais de savoir donner aussi de soi. Un de mes maîtres m'a dit un jour, alors que je me plaignais de son non interventionisme : "Il est plus facile de prendre la parole que de la donner..." Un maître donne la parole....

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    1. J'aime beaucoup ce que tu rapportes à la fin… Mais, est-ce une parole de maitre ou une parole de thérapeute ? Ça m'interroge…
      Mon expérience comporte de ne pas avoir confondu le maître ( que j'appelais "Maitre-à-penser", même si l'expression est un peu limitante), avec le thérapeute.
      Je ressentais le besoin de protection par les thérapeutes, pour le temps où leur présence et leur action n'était nécessaire à vaincre les peurs et les souffrances.
      mon maître réveillait plutôt mes aspirations les plus profondes, me faisaient accoucher du sens de ma vie, me montrait des possibles dont j'avais le choix. autrement dit il y a un contenu « d'enseignement ».
      Alors, il y a bien entendu une bienfaisance thérapeutique. Mais c'est quand même d'une autre nature que le travail « rapeux » d'une thérapie au sens strict du mot.
      Enfin, je me livre ici que ma propre expérience… Chaque chemin est distinct et par nature respectable.

      Cela dit, ce que tu exprimes est tout à fait juste. Et dans tous les cas, maître ou thérapeute, le but du jeu est de le quitter… Pour aller sa propre vie.
      (même si l'un comme l'autre ont imprimé leur marque en nous… Comme bien d'autres que l'on a croisés dans la vie)

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    2. Oui c'est mon psychanalyste qui m'a dit cela. Mais pour moi mon psychanalyste était en quelque sorte "mon maître à penser "parce que par la parole qu'il me donnait , il me donnait à m' exprimer moi et ma propre pensée , et par ses grognements ou ses soupirs ( que j'interprétais à ma façon) il me poussait à aller plus loin et plus profond . Jamais c'est vrai il ne m'a dit "comment penser" le travail était entièrement pour moi. Mais c'est sûr que si je disais une énormité, il allait faire en sorte que je m'explique et analyse cette énormité.
      L'analyse et l'analyste m'ont appris plus que n'importe qui et quoi, à devenir mon propre maître et donc à quitter un jour ce maître thérapeuthe. Comme tu le sais , je l'ai quitté 8 mois avant sa propre disparition qui fut quand même un gros choc pour moi. Le transfert ne s'en va pas ,"en effets," du jour au lendemain.

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    3. Je conçois très bien ce que tu exprimes. Et puis c 'est "ton" expérience de vie, et ça ne se discute pas en sens de mieux ou moins bien. Ça n'aurait pas de sens...
      Pour ma part, les personnes importantes que j'évoque sont toutes mortes....
      En même temps elles "tapissent" ma maison intérieure si je puis dire ainsi. Elles comptent parmi les personnes envers lesquelles j'ai le plus de gratitude. Et tu sais l'importance de cette attitude pour moi.

      Reprenant ton expression : - Jamais c'est vrai il ne m'a dit "comment penser"
      Ça je suis bien d'accord. (enfin c'est souhaitable...)
      perso, je dirai : il m'a appris "c'est quoi penser et se penser" et aussi "comment j'ai à m'y prendre, moi"... (c'est ce que j'appelle l'aspect enseignement).
      en même temps tout ça est difficile à dire en quelques mots....

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  4. J'aime beaucoup ta phrase "J'aime les grandes causes... Qui sont toutes petites.
    Pour moi, quand il s'agit du domaine intérieur les grandes causes sont toujours toutes petites...
    Dès que l'on franchit le seuil de la porte d'entrée l'expérience qui à prime abord m'apparaissait grande se transforme en une simplicité si évidente qu'il n'y a plus de différence entre grand et petit.
    Et le "vrai maître" est celui qui m'amène à franchir ce seuil. Maty

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    1. J'aime bien ce que tu dis, ça me semble un bon éclairage sur ce que Jésus dit de la difficulté de passer par le chas de l'aiguille. Il faut en effet se faire tout petit.
      Il me semble que c'est un incontournable. On arrive toujours avec le désir de faire de grandes choses. Au fond, c'est légitime. Le désir est puissant. On le projette immense…
      et plus on réalise de fait, plus on est conduit à une Humilité qui n'a rien à voir avec le rabaissement.

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  5. Les maîtres ont bien ce pouvoir de nous révéler un peu plus ce que nous sommes au fond de nous :-)

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    1. En effet, sinon ce sont des charlatans qui agissent avec la volonté de dominer et de prendre le pouvoir sur la personne.

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