Seuls existent les commencements,
les aurores nouvelles,
qui nous tirent de nos nuits.
Être toujours voyageur de l'Aube.

vendredi 27 février 2015

80 - Jésus et la femme de Samarie (Jean 4, 5-42) - Texte 3

(suite du billet N° 79)


JESUS Lui répondit : " Si tu savais le Don de Dieu, si tu connaissais Celui qui te dit : 'Donne-Moi à boire', c'est toi qui Lui aurais demandé, et Il T'aurait donné de l'Eau Vive".

Elle Lui dit: "Seigneur, tu n'as rien pour puiser et le puits est profond; avec quoi prendrais-tu l'eau vive ? Serais-tu plus grand que notre père Jacob qui nous a donné ce puits et qui en a bu lui-même, avec ses fils et ses bêtes ?".

"JESUS lui répondit: tout homme qui boira de cette eau aura encore soif ; mais celui qui boira de l'Eau que Moi Je lui donnerai n'aura plus jamais soif ; et l'Eau que Je lui donnerai deviendra en lui Source jaillissante pour la vie éternelle."

Elle prend un tour bizarre cette histoire. Jusque là c’était à peu près clair… On pouvait imaginer la scène  de ciné :  le type seul, la femme qui arrive au loin, la musique  façon Ennio Moriconne, le dialogue terre à terre des ennemis potentiels qui se défient….
Et là on change de registre. 
— Si tu savais à qui tu causes, m’dame, tu parlerais pas comme ça !
Et vlan !
— Mais qui c’est ce type ? «  il se la joue » ou quoi  ? C’est moi qui dois lui demander à boire ! Pi quoi encore ? il a même pas de quoi puiser l’eau ! Franchement il y a a qui s’y croient ! Ah ces hommes ! Ah ces juifs !  tous les mêmes !
En plus il sait pas que dans les puits l’eau est stagnante ! Oh pépère ! C’est pas une rivière qui coule au fond ! Pas d’eau vive….
Pour qui tu te prends ! Tu te crois supérieur ! Tu sais rien mec de l’histoire de ce puits sacré !

Bon OK j’imagine, je me projette… Me semble que j’aurais sans doute réagi de ce genre… Qu’est-tu viens nous donner la leçon, hein ?? T’es même pas d’ici et t’as pas l’air d’y connaitre grand chose en hydrologie !!

Je fus comme ça à une certaine époque. Et parfois je le suis encore. Le petit Jésus tout ça c'est des belles histoires pour enfants. Jésus : un doux rêveur, un utopiste, c'est gentil cinq minutes, mais la vie c'est quand même autre chose. Faut redevenir sérieux. Y'a pas de miracle ! D'ailleurs il a mal fini. Ce genre d'idée d'aimer tout le monde, on voit où ça conduit… Tendre l'autre joue quand on se fait taper dessus, c'est vraiment du grand n'importe quoi !…

Et cependant…
Malgré ce qu'elle va dire ensuite, elle commence par lui dire : « Seigneur »
On dirait qu’en moins de temps qu'il n’en faut pour l'écrire, il y eut une sorte de déclic en elle, quasiment malgré elle, mais elle ne le conscientise pas tellement, au point qu’aussitôt après elle reprend un discours mi-figue mi-raisin, avec un fond de railleries.
Reste que : Une sorte de petite brèche s'est ouverte en elle.

Alors Jésus parle d’une eau-source telle que l'on n’aurait plus jamais soif.
Les propos échangés entre lui et elle sont sous une forme ramassée. L'Évangile n’a jamais la forme d'un roman-fleuve. Mais on peut aisément imaginer un dialogue plus fourni. Parce que sinon, selon moi, la réaction de la femme Samaritaine qui va suivre ne serait pas vraiment crédible.
Cette Samaritaine connaît certainement les écritures anciennes. Elle en a été abreuvée. Comme les gens de ma génération ont été abreuvés de culture chrétienne. Ça ne s'oublie pas. On a tellement baigné dedans. Ça peut se rejeter. Ça reste quand même imprégné en nous. Et puis, si besoin, Jésus n’a pas du se priver de lui rafraîchir la mémoire…
L’ alliance avec Dieu, la Source de Vie, l’attente du Messie qui viendra étancher toutes les soifs, la différence entre le puits où il faut se rendre encore et encore… (pénible, fatiguant, redonnant encore soif….), et la Source jaillissante, la vie éternelle….
Il a du se montrer convaincant, À la fois par ses propos, mais certainement aussi par la puissance de son charisme personnel. Celui que l’on reconnaît chez quelqu’un bien au-delà de son discours. Cette personne dont on identifie qu’elle a quelque chose en elle que soi-même on n’a pas… pas encore…
Et si, par miracle, (pourquoi pas après tout), il pouvait nous refiler le truc ?…
Si je pouvais avoir, moi aussi, ce que lui a, et que je n'ai pas moi-même?

C'est peut-être cela que je cherche moi aussi. Éternel voyageur en quête des aurores. Cette quête intérieure. Ce jaillissement. Cette source qui alimente ma vie en permanence. Certes, je la connais, j'en ai l'expérience, je la reconnais. Et si elle était encore plus abondante que je ne crois ? Si elle pouvait étancher définitivement toutes mes soifs ? Si elle avait l'aptitude sans cesse d'en réveiller de nouvelles, Encore et encore ?
Si c'était en effet cela la vie éternelle ? Un jaillissement sans fin… qui m'abreuve, me déborde sans cesse, et me pousse au don de moi-même comme un mouvement naturel, un mouvement de ma nature la plus profonde, une puissance plus forte que mes propres ténèbres.

Je me plais à penser que la Samaritaine pige un peu quelque chose de cet ordre-là.
C'est pourquoi elle s'exclame :

— "Seigneur, donne-la moi, cette eau : que je n'aie plus soif et que je n'aie plus à venir ici pour puiser !"

(à suivre…)

8 commentaires:

  1. Par un retournement de situation c'est elle qui commence à avoir soif mais elle ne sait pas encore de quelle soif il s'agit...Et c'est Jésus qui lui demande "Donne moi à boire" qui va étancher sa soif.
    Vouloir en savoir plus relève de la soif .... J'ai acheté cette semaine un numéro spécial de l'Obs consacré exclusivement à " l'énigme Jésus". Tout à fait passionnant.Je te le conseille.
    Moi j'en suis au stade de la soif d'en vouloir savoir plus... sur l'homme Jésus .Je ne sais pas si , quand et comment je passerai au Christ... C'est l'homme qui m'intéresse surtout car comment aimer un dieu c'est inatteignable.Jésus était un pharisien qui avait beaucoup d'instruction: Il aurait pu écrire tout ce qu'il a dit:il ne l'a pas fait. Pourquoi ? Ses apôtres étaient des pauvres pêcheurs qui ne savaient ni lire ni écrire... Que de questions ... J'aime les questions...

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    1. L'homme Jésus me semble premier. Fort heureusement, les chrétiens disent Jésus-Christ et pas Christ-Jésus.
      Je m'en tiens à l'homme parmi les hommes. On avance par questions, certes, mais élaborer au moins quelques réponses personnelles qui fassent sens... C'est pas interdit !
      L'enseignement de Jésus n'est pas livresque. Dans les bouquins on raconte tout ce qu'on veut...
      L'enseignement est intérieur. Ça suppose de se tourner vers le soi profond, là où est LA relation. Là est le "lieu" de la rencontre. Un truc qui tient du Corps....
      il dira "Ceci est mon corps" il dira pas "Voici mes idées" !
      Un jour je dirais peut-être ce qu'est pour moi cette expérience-là ... Mais c'est pas sûr....
      L'indicible à ses exigences....

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  2. "Si je pouvais avoir, moi aussi, ce que lui a, et que je n'ai pas moi-même?"

    N'est-il pas venu et ne vient-il pas encore et encore pour montrer que nous aussi avons ce qu'il a.

    Le début de cette découverte c'est ressentir la soif et vouloir l'étancher. Parce que la soif, elle est là bien présente depuis le plus loin que je me souvienne elle me tenaillait. L'étancher est une autre histoire...
    Tous nos petits moyens: accomplissements de nos désirs, pensées philosophiques, de bonté, etc, recherches ne sont pas à la hauteur de la profondeur de cette soif.

    "mais celui qui boira de l'Eau que Moi Je lui donnerai n'aura plus jamais soif"

    Et cette eau pour moi c'est le début d'un long et réel processus intérieur vers tous ces beaux mots :
    silence - amour - grâce - bonté - paix - reconnaissance - compassion et un grand merci pour cette vie.
    Maty


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    1. Merci, Maty. Je te rejoins globalement.

      Je me demande s'il ne convient pas de passer (de tenter de passer) du "avoir ce qu'il a"
      à " ÊTRE ce qu'il EST".... Mais est-ce possible ? ....
      C'est peut-être là le sens de "plus jamais soif"...
      Je le sais pas....
      C'est cette soif qui me conduit sans doute à continuer à méditer cette page de l'histoire.... Cet épisode qui me semble assez central...

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  3. "avoir ce qu'il a"
    à " ÊTRE ce qu'il EST".... Mais est-ce possible ? ....

    N'est-ce pas la même chose... Ce qu'il a donne ce qu'il est. C'est juste ma façon de voir. Maty

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    1. oui, certes.... pour moi ce n'est pas totalement identique.
      bien sûr on donne ce que l'on a.....
      Je pense a l'épisode du mec plein aux as qui demande à Jésus : que dois-je FAIRE pour AVOIR la vie éternelle... ?
      Tout s'achète et tout se vend !
      Dans l'histoire, l'église "vendait" le paradis.... (les indulgences - Acheter des messes pour aller au ciel etc... pouah !!)

      On NE peut PAS AVOIR la vie éternelle.. On peut en revanche ETRE en elle.... pas demain...
      maintenant....
      C'est là que je fais une différence....
      Question de vocabulaire ?
      je ne sais pas...
      Perception différente sans doute...

      MERCI en tout cas de dire tes perceptions. C'est positif je trouve.

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  4. Pour moi, ce qu'il a c'est la connexion complète avec ce qu'il est.
    IL EST.

    L'église ça fait bien longtemps que ce n'est que des chimères pour moi.
    Ses paroles ont été interprétées pour contrôler ou simplement par un grand grand manque de connaissance intérieure.
    maty

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    1. Ta première phrase : dit comme ça, c'est OK !

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